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La collaboration titulaire-orthopédagogue au service des élèves

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Introduction

La collaboration est définie comme étant le fait de travailler conjointement en prenant des décisions de façon partagée afin d’atteindre un but commun. Cette pratique présente plusieurs avantages autant pour les spécialistes que pour les élèves. Dans cet article, vous pourrez voir en quoi le travail d’équipe étroit entre l’orthopédagogue et l’enseignante est profitable pour tous. Vous pourrez aussi y lire les conditions propices à mettre en place pour favoriser cette collaboration, sans oublier les défis, inévitables, qui s’y rattachent.

Quels sont les avantages de la collaboration entre l’enseignante et l’orthopédagogue?

Profiter de l'expertise de chacun

L’enseignante a une vision globale de ses élèves, et ce, dans divers contextes. De son côté, l’orthopédagogue, de par sa formation spécialisée, peut aiguiller l’enseignante sur divers enjeux vécus ou impasses du quotidien en s’appuyant sur ses observations. 

Par exemple, l’enseignante constate que ses élèves éprouvent des difficultés en écriture, et considère que ses pratiques ne répondent pas tout à fait à leurs besoins. L’orthopédagogue peut donc l’assister dans la mise en place d’ateliers d’écriture. Un élève peine à développer ses justifications en lecture, malgré de bonnes pratiques? L’orthopédagogue peut alors proposer des pistes de réflexion : 

  • Est-ce lié à un manque ou à une méconnaissance des stratégies? 

  • Est-ce en raison d’une fluidité non suffisante?

  • Est-ce dû à des difficultés langagières qui se répercutent ensuite dans ses réponses?

Ces temps d’échanges permettent à l’enseignante d’être plus en confiance dans ses choix, d’améliorer ses interventions en facilitant l’identification des besoins de ses élèves, et d’encourager l’utilisation de stratégies et de pratiques plus variées.

Diversifier l’étayage offert aux élèves

On constate que le personnel enseignant se sent démuni, peu outillé, ne sait pas toujours quoi prioriser et peine parfois à répondre aux besoins des élèves qui éprouvent des difficultés. Une pratique fréquemment intégrée dans les milieux scolaires est que l’orthopédagogue organise des interventions à l’extérieur de la classe avec un sous-groupe, communément appelé la co-intervention externe. Bien que cette pratique ait des apports certains pour les élèves, elle a aussi ses désavantages. Il ne s’agit pas de ne plus considérer le soutien à l’extérieur de la classe, mais plutôt de s’ouvrir à d’autres modèles. Il demeure nécessaire de varier l’organisation des services afin de répondre à la diversité des besoins, et pour étendre la portée des interventions à un plus grand nombre d’élèves.

En collaborant, l’enseignante et l’orthopédagogue peuvent faire une analyse approfondie et concertée des besoins pour ensuite être en mesure de choisir l’organisation la plus optimale. Le coenseignement est une modalité fort intéressante à considérer. Elle permet une plus grande différenciation, satisfait un plus grand nombre d’élèves et favorise le sentiment de compétence chez les enseignants.

Le coenseignement se produit lorsque deux ou plusieurs spécialistes qui possèdent différentes expertises enseignent à un groupe d’élèves en même temps, dans un même lieu. Cette méthode permet d’offrir des services spécialisés à des élèves en difficulté ou ayant des besoins particuliers au sein de la classe.  

(Friend et Cook, 2016)

Il est possible d’offrir plusieurs types de coenseignement

  • L’un observe pendant que l’autre anime : il s’agit d’un excellent moment pour avoir un regard extérieur sur la classe, les stratégies utilisées par les élèves, leurs réajustements ou prises de risques, les questions posées, les objectifs à cibler, etc.

  • Un enseignement alternatif : pour une même tâche, l’enseignant.e s’occupe de la majorité du groupe pendant que l’orthopédagogue soutient quelques élèves, tout en restant en classe. 

  • Un enseignement en atelier : l’orthopédagogue et l’enseignant.e peuvent à ce moment intervenir simultanément en sous-groupe, et ainsi optimiser leurs interventions auprès d’un plus grand nombre d’élèves. 

Ce ne sont là que quelques exemples de configuration possible lorsqu’on organise le partage des tâches et des responsabilités. Chacune présente autant d’avantages que d’inconvénients à prendre en compte. L’objectif est de toujours faire des choix judicieux dans le but d’offrir le meilleur soutien aux élèves au regard de leurs besoins.

Évaluer les élèves de façon optimale

En favorisant la collaboration, chacun peut contribuer à l’évaluation des élèves. Ce partage d’informations permet d’avoir un regard plus juste et nuancé de ces jeunes, tout en permettant de mieux cibler les objectifs et les moyens à mettre en place dans le plan d’intervention pour aider un élève en difficulté. Ce travail de réflexion est donc facilité par l’apport de chacun.

Favoriser l’uniformité dans les interventions

Afin de favoriser le transfert des apprentissages chez les élèves, il est nécessaire qu’une cohésion existe entre les divers intervenants. En misant sur la collaboration, l’enseignante et l’orthopédagogue s’assurent alors de cette continuité : le même langage est employé, les mêmes stratégies sont enseignées, les mêmes outils sont utilisés. De plus, l’orthopédagogue est appelé à travailler avec plusieurs membres d’une même équipe-cycle. Ainsi, la collaboration facilite une cohérence entre les pratiques à plus grande échelle : tous s’assurent d’offrir un enseignement équivalent qui répond aux besoins des élèves. 

Quelles sont les conditions propices à la collaboration?

Une bonne planification et organisation

Le temps de rencontre est essentiel et permet une cohérence dans les interventions auprès des élèves. Ces moments facilitent la planification des tâches, le choix des regroupements, l’étayage offert ainsi que le choix des outils en fonction des besoins. Également, ce temps d’échanges permet à l’enseignant.e et l’orthopédagogue d’avoir une meilleure régulation de leurs pratiques : revoir l’organisation des regroupements ou la séquence d’enseignement, des objectifs et des moyens ciblés. Tout cela dans le but de mieux soutenir les élèves selon leur évolution.

Les défis reliés à la collaboration

L’ouverture et la confiance

La collaboration doit être vue comme un soutien que les deux intervenants s’apportent mutuellement, et non pas une occasion de juger le travail de l’autre. Ce partenariat suggère des échanges fréquents concernant des ajustements au niveau d’une séquence, sur des remises en question, des observations ou des questionnements à propos des élèves ou des pratiques utilisées. Il importe donc de garder à l’esprit que le but de ces échanges entre spécialistes se veut constructif. 

L’inconfort lié aux changements 

Le changement de pratiques peut être exigeant et déstabilisant. Le coenseignement, par exemple, exige une modification des habitudes, ce qui peut être un défi pour plusieurs. Il faut donc savoir accepter le rythme de chacun. Gardons toutefois en tête que la collaboration est une occasion de partager de nouvelles pratiques ou de nouveaux dispositifs en classe. Se choisir de petits objectifs et se permettre de se tromper permet d’évoluer, tout en prenant confiance en soi.   

Les horaires chargés 

Il faut savoir profiter de toutes les occasions pour discuter. L’échange de courriels ou même posséder un espace de clavardage peut faciliter les échanges malgré le manque de temps. Le soutien des gestionnaires peut aussi être un enjeu pour réussir une bonne collaboration. Les directions doivent donc être des soutiens en ce sens en offrant des conditions gagnantes aux équipes de travail. Par exemple, en dégageant dans l’horaire des temps communs de rencontre ou en offrant des libérations à divers moments dans l’année. 

Conclusion

La capacité à collaborer avec les divers membres du milieu scolaire fait partie des compétences attendues chez les enseignants. Malgré les défis avec lesquels le personnel enseignant doit inévitablement jongler, la collaboration favorise l’évolution professionnelle progressive de part et d’autre. En travaillant étroitement avec l’orthopédagogue, un but commun est poursuivi : l’atteinte du plein potentiel des élèves au cours de leur parcours scolaire.

Pour aller plus loin

À voir
Référenes bibliographiques ou sources citées

BEAUMONT, C., LAVOIE, J. et COUTURE, C., Les pratiques collaboratives en milieu scolaire : cadre de référence pour soutenir la formation, CRIRES, 2011

CTREQ — recherche collaborative, Projet Savoir — La collaboration entre enseignants et intervenants en milieu scolaire, 2018

GRANGER, N., Le coenseignement — Un dispositif favorable à la mise en œuvre de l’éducation inclusive, Université de Sherbrooke, Automne 2022

TREMBLAY, P., Le coenseignement en inclusion scolaire : un mariage naturel, Revue Suisse de pédagogie spécialisée, 2013

Caroline Côté
Orthopédagogue au primaire
Martine Jalette
Orthopédagogue et titulaire au primaire

À propos des autrices

Passionnée de formation continue, de lecture et d’écriture, Caroline Côté est orthopédagogue depuis plus de 10 ans et a complété un DESS en éducation portant sur la différenciation et le développement du langage écrit par le biais de la littérature jeunesse. Toujours à la recherche de projets stimulants, elle collabore avec divers acteurs du milieu scolaire pour partager ses expériences et ses idées afin d’inspirer et d’accompagner les enseignants dans leurs pratiques. Collaboratrice pour le blogue J’enseigne avec la littérature jeunesse, Caroline offre aussi des formations qui touchent à la littératie.

Depuis un peu plus de 10 ans, Martine Jalette est titulaire d’une classe au 2e cycle du primaire dans une école spécialisée pour les élèves ayant des troubles graves d’apprentissage. Toujours curieuse et motivée à en apprendre davantage, elle a complété une maîtrise en orthopédagogie et un DESS en éducation. Martine réserve une grande place à la littérature jeunesse dans sa classe. Son plus grand désir : partager à grande échelle son amour pour la lecture et permettre à ses élèves de progresser dans un milieu stimulant.

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